Une culture d’honneur

Je suis ici dans une salle où se trouvent des leaders de tout le continent, dont l’âge, la race, la nationalité, les dons et la personnalité sont très variés. Des femmes et des hommes qui « s’appuient » les uns sur les autres avec un respect aimant et un engagement à l’unité. Une salle où règne l’honneur. C’est si émouvant, si riche de sens, si proche de ce que Dieu veut que son peuple vive.

Dans le royaume de Dieu, l’honneur n’est pas réservé à ceux qui sont considérés comme « grands »; les puissants ou ceux qui détiennent une position et des richesses. L’honneur n’est pas un simple cérémonial et ne s’adresse pas qu’à des personnes exceptionnelles. L’honneur est ce que l’on veut exprimer à l’égard de ceux qui dirigent, servent ou vivent simplement leur vie quotidienne avec fidélité et intégrité. Ceux qui font preuve d’humilité et d’un esprit de service en vivant pour le « Roi serviteur » sont ceux qui sont considérés comme grands dans le royaume.

L’honneur est une pratique attendue de ceux qui suivent Jésus, tant dans la vie de l’église que dans des contextes culturels plus larges. La Parole de Dieu contient des instructions telles que : « Que l’amour soit sans hypocrisie. Ayez le mal en horreur, attachez-vous au bien. Par amour fraternel soyez pleins d’affection les uns pour les autres et rivalisez d’estime réciproque. Ayez du zèle, et non de la paresse. Soyez fervents d’esprit et servez le Seigneur[1]. »

Et « Rendez à chacun ce qui lui est dû : l’impôt à qui vous devez l’impôt, la taxe à qui vous devez la taxe, le respect à qui vous devez le respect, l’honneur à qui vous devez l’honneur[2]. »

Comme l’indique le document de position des APDC « A Biblical and Theological Study of Authority » (Une étude biblique et théologique de l’autorité) concernant le respect des autorités dirigeantes : « Jésus a fait attention de respecter l’autorité du gouvernement et d’éviter tout soupçon de recherche de pouvoir pour lui-même. Lorsque ses détracteurs juifs ont tenté de le piéger avec une question sur les impôts, il a répondu : “Rendez donc à l’empereur ce qui est à l’empereur” (Mt. 22.21)… Paul et Pierre affirmeront plus tard cette position en appelant les croyants à se soumettre aux autorités gouvernantes parce qu’elles ont été établies par Dieu (Ro. 13.1-4; 1 Pi. 2.13-14). La seule exception à ce principe est lorsque l’autorité exige des croyants qu’ils désobéissent à Dieu (Actes 4.18-20)[3]. »

Dans la société en général et dans l’église, la pratique de l’honneur est en difficulté. Les abus de pouvoir, les comportements déshonorants et les actions qui sèment la discorde sont une réelle source d’inquiétude, d’où l’importance d’établir des relations et des processus qui nécessitent de rendre des comptes. Les attitudes et les actions de ceux qui occupent des postes d’autorité dans les domaines politique, juridique ou religieux suscitent des inquiétudes légitimes. Au sein de diverses communautés religieuses, les multiples incidents liés à des abus de pouvoir et à des comportements répréhensibles ont créé une atmosphère où faire preuve d’honneur est devenu une pratique en voie de disparition. Le déni ne permettra pas de résoudre les problèmes profonds. Les APDC ont reconnu que l’« abus de pouvoir » est un motif de mesure disciplinaire pour les leaders accrédités et mettent actuellement en place des procédures plus efficaces pour gérer de tels cas.

Cela n’enlève rien à l’appel à être par amour fraternel « pleins d’affection les uns pour les autres » et à rivaliser « d’estime réciproque ». Ou à rendre « à chacun ce qui lui est dû... le respect à qui vous devez le respect, l’honneur à qui vous devez l’honneur. » Mon expérience de vie m’a convaincu que dans mon monde de relations et d’autorités, il y a eu beaucoup plus de personnes à honorer qu’à craindre et à suspecter. Parmi les nombreux amis, collègues, mentors et autorités dans ma vie, aucun n’a été parfait. Certains ont frôlé l’abus. Mais beaucoup d’autres ont été des modèles et ont enseigné les attributs fondamentaux d’une vie d’amour pour Dieu et pour les autres, et j’ai choisi de les honorer et de laisser leur influence et leur exemple déteindre sur moi. Les gens n’ont pas besoin d’être parfaits pour être respectés et imités. Il n’est pas nécessaire d’être naïf pour être enseignable.

L’expérience que j’ai vécue récemment dans une salle d’honneur n’a été possible que parce qu’un groupe diversifié de leaders a renoncé aux pratiques traditionnelles consistant à se donner des airs et à accorder de l’importance à la position, et se sont plutôt honorés et appréciés les uns les autres comme le demandent les Écritures. L’honneur naît lorsque nous voyons les autres comme des êtres créés à l’image de Dieu, qui nous révèlent son caractère et sa nature. C’est pourquoi, avec les personnes nobles et douées, les « plus petits d’entre eux » doivent également être honorés pour la manière dont ils révèlent les réalités du royaume de Dieu. L’honneur ne consiste pas en ce que les autres peuvent faire pour nous du fait de leur force ou de leur perfection; il consiste à reconnaître que Jésus est avec nous dans la relation et à discerner comment il peut se révéler au travers de chacun d’entre nous.

Nous avons des choix à faire dans le contexte actuel. Nous devons nous efforcer de faire en sorte que nos comportements à l’égard des autres reflètent la valeur que Jésus leur accorde. Nous devons protéger les personnes vulnérables et intercéder pour ceux qui sont bafoués par les autres. Et nous devons honorer les personnes honorables en cherchant à recréer une culture d’intégrité et d’honneur dans nos églises et dans la communauté au sens large.

Seigneur, nous demandons ce que ta Parole nous appelle à faire. Que notre amour soit sincère en détestant le mal et en nous attachant au bien. Augmente notre dévouement les uns envers les autres dans l’amour. Rends-nous capables, par ton Esprit, de nous honorer les uns les autres plus que nous-mêmes, alors que nous te servons avec zèle et ferveur spirituelle. Pour ta gloire et pour la bénédiction de ceux qui nous entourent, nous te prions. Amen.